Descente de la Méditerranée

Dès le lendemain de notre départ, la vie à bord du Williwaw s’organise. La météo est prise et ne s’annonce guère profitable. Il nous faudra aller chercher du vent le long des côtes espagnoles. Sur le trajet, nous ferons la rencontre, tout à fait fortuite, de « Mille Visages » magnifique open 55 et de son skypper Hervé Vachée, qui, quelques années auparavant, participèrent à la route du rhum et au tour de Corse avec la très regrettée Florence Arthaud. La surprise est d’autant plus belle que nous avions fait connaissance 2 mois plus tôt lors de notre séjour en Corse.

Le vent est capricieux, parfois inexistant, parfois violent comme sous ce premier grain que nous prendront en pleine face au milieu de la nuit, au large de Barcelone. La houle est assez forte, rendant la mer hachée comme les navigateurs de la Méditerranée ne la connaisse que trop. Il faut avoir l’estomac bien accroché.

Mais revenons quelques instants sur ce grain, car il fut un baptême pour nous trois. Minuit, Nicolas est seul à la barre, de quart, pendant que Thomas et Romain se reposent d’une journée bien chargée. Le ciel, couvert de nuages, quoique peu menaçant avant la tombée de la nuit, ne laisse pratiquement aucune lumière pour s’orienter visuellement. Pas d’étoiles dans le ciel. Williwaw file grand largue par petit vent, quand tout un coup, c’est le déluge et le vent vire de 180°. Williwaw prend alors de plein fouet des rafales allant de 35 à 40 noeuds. Immédiatement, Nicolas appelle du renfort et c’est en caleçon munis de leur seuls gilets, que Thomas et Romain viendront en aide pour éviter la casse. Les gestes doivent être précis et rapides. Il faut affaler en vitesse, pour éviter de déchirer les voiles. Nicolas se positionne au mat pour affaler la GV, Romain est au piano pour larguer les drisses et enrouler le génois et Thomas démarre le moteur pour assurer la manoeuvre puis prend la barre. En quelques minutes, le bateau et ses matelots sont en sécurité, mais rudement mouillés par le pluie diluvienne qui continue de s’abattre. Plus de peur que de mal, l’émotion est vive mais les marins fiers d’avoir survécu avec sang froid à leur premier grain.

En fin de compte, pas d’incidents majeurs à déclarer, si ce n’est que notre spi se déchirera au cours d’une belle après midi, alors que nous naviguons grand largue (vent par 3/4 arrière) sous bonne brise. Heureusement, nous ne sommes pas encore au milieu de l’Atlantique et nous pourrons le faire réparer lors d’une prochaine escale.

Notre premier stop se fera à Malaga où nous resteront une trentaine d’heures à peine, le temps de refaire le plein de nourriture fraiche, de gasoil et d’eau. Nous subirons tout de même en direct, la lourde défaite des français face aux terribles All Black de Nouvelle Zélande. Le moral n’en sera pas affecté.

Puis Gibraltar, dans sa partie espagnole, nous accueillera pour 24h afin d’attendre une fenêtre météo convenable pour le passage du détroit.